Fuck le monde

No 70 - été 2017

Simon-Pierre Beaudet

Fuck le monde

Philippe Boudreau

Simon-Pierre Beaudet, Fuck le monde, Montréal, Moult Éditions, 2016, 270 pages.

Une fois, c’t’un gars, y’est révolté. Contre le système. Contre la laideur. Contre la bêtise.

Il est trentenaire, habite Québec et enseigne la littérature au collégial. Il s’appelle Simon-Pierre Beaudet et son livre nous offre une compilation de 32 de ses textes vitrioliques parus dans différents blogues, dont la Conspiration dépressionniste.

Armé de sa plume acérée, Beaudet propose ici des réflexions décapantes sur une variété de sujets, liés tantôt à son quotidien, tantôt à des catégories plus traditionnelles : la politique, l’économie, les médias, les sports, etc.

Disons-le sans détour : ce livre est délicieux. Nous avons adoré voir Bombardier être crucifiée, Ricardo se faire embrocher, les radios-poubelles être traînées dans la boue, l’étalement urbain être écorché vif, la voiture solo broyée par une presse hydraulique, Mélanie Joly et Paul St-Pierre Plamondon (Génération d’idées) subir le supplice de l’écartèlement.

Page après page, l’auteur refuse de se laisser entuber. Il déboulonne les mythes, débusque l’arnaque, expose le mensonge et met à nu les apories fondamentales de la société de consommation nord-américaine. En outre, Beaudet excelle à se faire l’anthropologue de la banlieue, spécialement celle de la deuxième ou troisième couronne, dont il décrit l’environnement anomique et aliénant.

Il faut le voir déconstruire le caractère soi-disant coopératif du « mouvement » Desjardins. Il faut le voir présider l’hommage funèbre anticipé du retour des Nordiques à Québec. Il faut l’entendre se questionner à haute voix sur ce qu’est la masculinité, à la lumière du « spécial cuisine de gars » du populaire chef R. Larrivée.

Il faut le voir vomir sur le Canada, ce non-pays fragile, à la culture hésitante, qui cherche désespérément à se donner une identité nationale, à grand renfort de symboles superficiels et d’interventionnisme du gouvernement central.

Il faut prendre acte de sa rupture avec le PQ – alors que Beaudet a pourtant voté oui au référendum de 1995 : « Les 20 années subséquentes de péquisme, du sommet socioéconomique de 1996 à la charte des valeurs, ont à peu près complètement récuré ce qui pouvait subsister de nationalisme en moi. »

Bref, Simon-Pierre Beaudet sait se faire plaisir. Faisons comme lui et accompagnons-le dans sa démarche iconoclaste !

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