Forum ouvert : la démocratie syndicale autrement

No 75 - été 2018

Entrevue avec Ariane Bilodeau

Forum ouvert : la démocratie syndicale autrement

Ariane Bilodeau, Isabelle Bouchard

L’univers du syndicalisme est plus ouvert aux débats que d’autres milieux. Toutefois, les codes et procédures utilisés visent souvent la prise de décision plutôt que la délibération collective. Voilà que le STT-CSN, le syndicat des personnes salariées à la CSN, a récemment fait l’expérience du forum ouvert. Nous avons demandé à Ariane Bilodeau, membre du syndicat, de décrire l’expérience.

À bâbord ! : Comment résumer la formule du forum ouvert ?

Ariane Bilodeau : Le forum ouvert, aussi appelé open space, consiste principalement à aménager des espaces de discussions informelles permettant à toutes et à tous d’être sur le même pied d’égalité dans leur participation aux discussions. Il n’y a ni direction ni contrôle, mais plutôt une entière liberté. Le concept de forum ouvert repose sur une loi, celle de la mobilité, c’est-à-dire que si nous ne sommes en train ni d’apprendre ni de contribuer aux échanges, nous pouvons passer à autre chose !

Comme lors d’une pause-café, il n’y a pas de stress à prendre une décision hâtivement, il s’agit seulement d’échanger de façon respectueuse dans le but de comprendre les divers points de vue sur un sujet donné et apprendre de ceux-ci. L’ordre du jour est composé de différents ateliers et les participant·e·s sont libres de choisir ceux auxquels ils et elles veulent participer. La durée de la discussion leur appartient également.

ÀB ! : Quel contexte a conduit votre syndicat à expérimenter le forum ouvert ?

A. B. : Par sa nature, notre milieu de travail en est un politiquement et émotivement exigeant. Il faut parfois prendre du recul pour rebâtir et redéfinir ce que nous sommes et ce que nous souhaitons pour l’avenir. La formule du forum ouvert semblait parfaite pour nous permettre de faire de réels échanges et de jeter les bases pour une suite à la hauteur de nos attentes individuelles et collectives.

ÀB ! : Quelle forme cette expérience a-t-elle prise concrètement ?

A. B. : Nous étions environ 300 membres lors de l’événement, qui consistait d’abord en une soirée où s’est construite la programmation des deux jours d’ateliers. Ainsi, 260 sujets et questions (parfois similaires) émises par les membres ont donné lieu à 90 ateliers. Au total, 68 discussions se sont déroulées, avec de 15 à 20 personnes par ateliers. La configuration des lieux eux-mêmes est très importante. Les chaises sont placées en cercle, sans table, un peu comme une soirée autour d’un feu de camp, permettant ainsi une proximité essentielle pour des discussions constructives. Une personne se porte volontaire pour animer avec la préoccupation de favoriser la prise de parole de toutes et de tous, tandis qu’une autre prend des notes qui seront ensuite envoyées à l’ensemble des participant·e·s.

ÀB ! : Quel bilan tirez-vous ?

A. B. : Cet exercice a été de loin le plus constructif et inspirant que le STT-CSN ait connu depuis fort longtemps. Toutes et tous ont pu repartir avec un sentiment d’avoir pris véritablement part aux discussions. Celles et ceux qui ont moins le réflexe ou l’habitude de débattre ont pu le faire sans gêne et une fierté s’en est dégagée. Des militant·e·s de longue date ont témoigné qu’une telle expérience démocratique leur avait était unique. Nous étions dans un espace inconnu que nous devions nous approprier avec un but commun : celui d’être au cœur du mouvement en partageant nos idées tant originales qu’intelligentes et ainsi consolider notre force collective en jetant les bases d’une nouvelle manière d’entrevoir la vie démocratique syndicale.

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