Le feu est pris

No 89 - septembre 2021

Éditorial du no 89

Le feu est pris

Le Collectif de la revue À bâbord !

Ça brûle dans notre cour. L’augmentation du nombre de périodes de grande chaleur et de sécheresse sur la planète a créé les conditions d’immenses feux de forêt dévastateurs qui font rage un peu partout. Depuis quelques années, nous faisons face chaque été à de nouveaux records de chaleur, comme ce fut le cas au mois de juillet 2021 où la température a atteint des sommets jamais égalés. Les scientifiques tentent désespérément de transmettre aux populations des données alarmantes qui traduisent un bouleversement climatique sans précédent. Selon plusieurs, ces changements atteindront très bientôt un point de non-retour si nous ne changeons pas drastiquement et rapidement nos habitudes de vie. Le méthane du pergélisol est relâché dans l’atmosphère, les océans étouffent sous le coup de l’acidification, le Gulf Stream donne des signes avant-coureurs d’effondrement, des lacs et rivières s’assèchent, des glaciers disparaissent en augmentant le niveau de la mer et des villes connaissent des inondations destructrices. Le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), rendu public en août dernier, stipule que certains impacts du réchauffement climatique sont désormais irréversibles.

Ceux et celles qui subiront les conséquences de cette catastrophe ne sont pas les populations qui ont le plus contribué à créer cette crise climatique. Il est admis que les personnes et les États les plus riches sont ceux qui polluent le plus et qui s’en tireront le mieux. L’odieuse mainmise de ces mêmes États sur les doses de vaccins contre la COVID-19 nous permet d’imaginer de quelles manières les ressources seront réparties en cas de catastrophe climatique généralisée si nous ne faisons rien. Mais cette situation injuste où les responsables de la crise ne sont pas ceux et celles qui en subiront les pires contrecoups est aussi intergénérationnelle. Ce ne sont pas les jeunes d’aujourd’hui qui ont provoqué ces bouleversements, mais ce sont eux et elles qui en éprouveront le plus les impacts. On peut dire qu’on leur a laissé une patate bien chaude entre les mains.

L’inaction des gouvernements face à une crise désormais bien installée est scandaleuse et indique clairement que nous nageons en pleine dissonance cognitive. Le premier ministre du Québec, François Legault, n’a pas réagi au rapport du GIEC ; du côté des Libéraux fédéraux, on a rétorqué que les revenus du pipeline Trans Mountain permettraient de financer la lutte aux changements climatiques. Du délire ! La pandémie donne lieu à d’autres situations surréelles : aux Jeux olympiques de Tokyo, les médailles ont été fabriquées avec des matériaux d’ordinateurs recyclés, mais, pendant ce temps, on a construit des stades immenses demeurés presque vides. Business as usual !

Il faut changer ce système qui récompense depuis trop longtemps les plus grands pollueurs. Il est de notre devoir de citoyens et de citoyennes de nous mobiliser pour exercer une pression sur nos gouvernements afin qu’ils engagent une réelle transition énergétique, car il est presque déjà trop tard. Au moment d’écrire ces lignes, souhaitons que les appels pour la grève internationale pour le climat du 24 septembre soient entendus. D’autres actions viendront dans le cadre de la prochaine conférence des Nations Unies sur le climat (la COP 26, prévue à Glasgow cet automne). De même, le dossier de ce numéro montre qu’une « Vague écologiste au municipal » s’organise en vue des élections de novembre prochain.

La pandémie de COVID-19 a été l’occasion de diffuser un mot d’ordre au sein de la gauche : « Pas de retour à l’anormale ». La crise climatique montre à son tour que, d’une manière ou d’une autre, un retour en arrière est impossible. Nous entrons dans une nouvelle ère, et il faut agir rapidement afin d’y vivre dignement.

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