Dossier : Bibliothèques. Enjeux (…)

Dossier : Bibliothèques. Enjeux et mutations

La petite séduction ou les enjeux en région

Aline Crédeville

Les bibliothèques publiques québécoises partagent toutes les missions énoncées par l’UNESCO. Selon la Déclaration des bibliothèques québécoises, l’ambition est d’offrir un « accès libre et illimité à la connaissance, la pensée, la culture et l’information », et ce, dans le contexte actuel marqué par les mutations technologiques. Or, à la modernité et à la mobilité des technologies, on oppose souvent une image désuète et statique d’une institution réduite à un guichet de prêt de livres. Une image d’autant plus ancrée en région.

Si 80% de la population du Québec est desservie par quelque 190 bibliothèques publiques autonomes concentrées dans les grands centres urbains, on compte néanmoins 705 bibliothèques publiques desservant les Québécois et Québécoises établi·e·s dans les régions. On parle souvent, dans le milieu, des « petites » bibliothèques, un diminutif simplement factuel lorsque l’on considère que celles-ci desservent chacune moins de 10000 habitants, voire moins de 5000. Ces petites bibliothèques sont dites « affiliées » parce qu’elles s’insèrent dans un « Réseau BIBLIO » régional. On compte 11 de ces réseaux au Québec, répartis selon les régions administratives, et ils desservent les populations de près de 700 municipalités.

Un rôle crucial

Les « Réseaux BIBLIO » ont pour mission de venir assister les municipalités dans le développement et la diffusion de leur service de bibliothèque. Cette assistance est principalement professionnelle et technique. Elle se concrétise par un éventail de services allant du prêt de collections de documents actuels, à un service-conseil pour l’aménagement des locaux suivant des normes modernes, en passant par l’informatisation des petites bibliothèques. Le « Réseau BIBLIO » offre aussi un accès à des répertoires d’activités, contribuant à l’animation des bibliothèques pour favoriser le partage et l’apprentissage de la lecture, bien entendu, mais aussi l’usage du numérique. À travers ce partenariat, les bibliothèques peuvent pallier certains manques criants, notamment concernant la professionnalisation des employé·e·s, qui demeure néanmoins sous-financée.

On veut bien d’un bâtiment estampillé « bibliothèque », mais convaincre les élu·e·s d’investir pour le faire fonctionner afin d’offrir un service optimal est une tâche ardue. Sur le plan de l’allocation budgétaire, la bibliothèque entre en rivalité avec le financement général de la culture et des équipements sportifs. En effet, dans l’organigramme, les services culturels, dont font partie les bibliothèques, se trouvent dans la même division que les sports et les loisirs. Or, si les élu·e·s décident des orientations budgétaires de leur municipalité, c’est bien les citoyen·ne·s qui fournissent les fonds grâce à leurs taxes.

Faire levier

La situation peut sembler délicate, et elle l’est. Il est sans doute plus facile dans les centres urbains de constituer une communauté autour de la bibliothèque, démontrant son importance culturelle, sociale et économique afin de faire levier auprès des pouvoirs publics. Pourtant, à leur échelle, les petites bibliothèques municipales, tout comme celles des « réseaux BIBLIO », devraient user de cette stratégie.

Les élu·e·s veulent remporter leur prochaine élection. Il s’agit alors pour les bibliothèques et les réseaux, à travers leurs services de prêts et d’animation, de continuer à tisser des liens forts avec les communautés citoyennes, de s’appuyer sur différents partenaires associatifs ou communautaires afin d’attirer l’attention sur l’appui que les bibliothèques obtiennent auprès des citoyen·ne·s. C’est en ce sens que parvenir à toucher les publics, anciens et nouveaux, constituera une stratégie doublement payante pour leur avenir

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