L’origine du capitalisme

No 31 - oct. / nov. 2009

Ellen Meiksins Wood

L’origine du capitalisme

Lu par Éric Chalifoux

Éric Chalifoux

Ellen Meiksins Wood, L’origine du capitalisme, Montréal, Lux Éditeur, 2009, 313 p.

Le volume passe en revue plusieurs auteurs qui se sont attardés sur l’émergence du capitalisme. Nous avons ainsi droit à une étude chirurgicale de ce moment historique. L’auteure nous conduit dans cette véritable épopée humaine par une analyse en règle du fonctionnement de la société féodale, de l’affrontement des nobles avec la bourgeoisie montante, de la révolution agraire qui s’opère et des droits de propriété privés qui se transforment.

L’ ouvrage dresse un brillant parcours de la société qui a donné naissance à cette révolution sociale sans précédent. Meiksins Wood brosse un tableau de la société de l’époque féodale alors que le capitalisme embryonnaire tente de prendre sa place. Le capitalisme est en rupture avec les principes économiques de l’époque féodale et cela ne se fait évidemment pas sans heurts. L’auteure relate clairement la fin du féodalisme, donc du servage, et tous les tiraillements que cela cause à la noblesse. De plus ce processus s’accompagne de la naissance de l’État-nation et nous comprenons que les forces en place expliquent l’attrait qui se fait jour pour un État centralisateur.

Le fait que tout tourne autour d’une révolution agraire nous étonne un peu ; on aurait naïvement pensé que le commerce aurait été l’élément central de cette transformation. Or, c’est dans l’agriculture et par l’agriculture que le capitalisme vient au monde. Nous puisons dans cette réflexion bien des éléments quant à nos propres rapports avec la nature ; nous pouvons facilement prolonger ces réflexions à propos de la conscience environnementale si déficiente aujourd’hui, même si l’auteure elle-même ne va pas jusque-là.

À l’époque féodale, la propriété n’était pas rattachée seulement à une personne : des droits coutumiers à l’avantage des paysans qui travaillaient pour les grands propriétaires terriens venaient limiter le caractère exclusif des droits de propriété. Un renforcement de ces droits est venu changer la donne ; dorénavant la propriété devenait identifiée à une personne et aucune autre personne ne pouvait glaner quoi que ce soit sur cette même propriété. Parmi les conséquences du renforcement des droits de propriété : la création d’une masse de travailleurs disponibles, la marchandisation du travail, l’appropriation du travail d’autrui, l’établissement des « lois du marché » : le profit, l’offre et la demande.

Le capitalisme est né en Angleterre plutôt qu’à Florence ou chez les Flamands ; ces derniers se faisaient pourtant remarquer pour leur commerce dynamique. Un contexte bien particulier a pu donner naissance au capitalisme et ce n’est qu’en Angleterre que le terreau y était propice. Voici un ouvrage d’érudition sociale, économique et politique sur une période bien précise de l’histoire. Alors que nous vivons à une époque remplie de turbulences tant économiques que sociales, ce livre jette un regard sur un passé pas si lointain dans l’espoir d’alimenter les réflexions présentes et de contribuer à nous projeter dans l’avenir.

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