Alternatives à la globalisation économique

No 13 - février / mars 2006

John Cavanagh et Jerry Mander (dir.)

Alternatives à la globalisation économique

lu par Christian Brouillard

Christian Brouillard

John Cavanagh et Jerry Mander (dir.), Alternatives à la globalisation économique :
un autre monde est possible
, Écosociété, Montréal, 2005, 503 pages.

Encore un ouvrage sur la mondialisation capitaliste et ses opposants, direz-vous. Comme vous vous êtes tapé l’ensemble des traductions françaises de Noam Chomsky ou l’intégralité des petits ouvrages produits par ATTAC aux éditions Mille et Une Nuits, vous vous dites qu’il n’y a décidément plus rien de neuf que vous ne puissiez apprendre. Vous n’avez pas totalement tort, car les différents auteurs ayant contribué à Alternatives à la globalisation économique (sous la direction de John Cavanagh et Jerry Mander de l’International Forum on Globalization) brossent, dans un premier temps, un tableau de la globalisation qui est, dans ses grandes lignes, assez connu : un processus piloté par les transnationales en vue d’augmenter au maximum leurs profits, le tout favorisé par les institutions internationales comme le Fonds monétaire international (FMI) ou la Banque mondiale (BM) et les États qui privatisent à tout vent les biens communs. Les conséquences sont, elles aussi, bien connues : pauvreté, destruction des cultures locales, guerres, bouleversement des écosystèmes, etc.

L’intérêt de cet ouvrage est ailleurs. Car dans un deuxième temps, les auteurs tentent de répondre à la question souvent entendue depuis novembre 1999 lors de la bataille de Seattle : « Si vous n’êtes pas pour la globalisation, alors, quel système proposez-vous ? ». C’est ici que cela devient passionnant, car nous avons droit à un portrait détaillé des nombreuses alternatives face au modèle économique dominant, qui tentent de s’élaborer partout sur la planète, que ce soit aux niveaux local, national ou international. À partir de ces expériences, les auteurs dégagent plusieurs principes pour la création d’une société viable. Ces principes peuvent se résumer en un point central : il faut, dans toute la mesure du possible, ramener les centres de décision là où les gens vivent et produisent, c’est-à-dire au niveau local. C’est à cet échelon, affirment les auteurs, que l’on peut arriver à construire une réelle démocratie et être mieux à même de contrôler les activités des grandes entreprises. Il faut quand même rester lucide, le local peut aussi être un espace qui engendre des inégalités et des rapports autoritaires. Cependant, selon les auteurs, il y a plus de possibilités offertes à la participation populaire dans des organismes locaux que dans ces institutions bureaucratiques que sont le FMI ou la BM.

Après lecture de ce livre, une seule réticence nous vient à l’esprit, mais elle est de taille. Car, au travers de leurs diverses contributions, jamais les auteurs ne remettent en question la légitimité du mode de production dominant, à savoir le capitalisme. Sans tomber dans un dogmatisme idéologique ou des chicanes de mots, il faut bien se poser cette question : la mondialisation à laquelle nous assistons est-elle uniquement néolibérale ou, plus profondément, exprime-t-elle un nouveau stade atteint par le capitalisme ? Répondre oui au second volet de cette question implique de penser un post-capitalisme, par-delà les expériences désastreuses du XXe siècle, renouant ainsi avec les traditions radicales du mouvement socialiste et ouvrier.

Malgré cette divergence de vue que nous pouvons avoir, Alternatives à la globalisation économique constitue une base stimulante pour réfléchir et débattre sur les alternatives concrètes à construire face à la situation actuelle. Ce qui, en ces temps de démission intellectuelle, n’est pas rien !

Le site de l’International Forum on Globalization

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