Les déboulonneurs

No 20 - été 2007

Pas vu à la télé

Les déboulonneurs

Nesrine Bessaïh

Après le graffiti, le graf et le tag, voici que certains se revendiquent du barbouillage. Quelle est la différence ? Graffiti est un terme générique qui englobe les trois autres et qui désigne un écrit ou un dessin dans un espace public. Le graf et le tag, plutôt associés à la culture rap, se distinguent par le fait que le tag est une simple signature unidimensionnelle tandis que le graf, généralement bidimensionnel et polychrome, peut impliquer un message plus étoffé qu’une signature. L’acte de barbouillage partage la volonté de réappropriation des espaces publics que comporte le graf et le tag. Cependant, d’après Bertille, une déboulonneuse de la ville de Lyon, le barbouillage se distinguerait du reste parce qu’il comporte toujours un message politique et qu’il n’est jamais un acte caché puisqu’il s’insère dans une démarche de désobéissance civile.

Les déboulonneurs se fixent une date où se réunissent quelques dizaines, voire une centaine d’individus dans une station de métro ou le long d’une route outrageusement placardée d’affiches publicitaires. Le rassemblement sert principalement de manifestation d’appui, tandis que quelques personnes munies de canettes de peinture barbouillent des panneaux publicitaires : « Consomme, pollue » sur une publicité pour une voiture ; « fétichisme de la marchandise » et « pollution mentale » sur des affiches de la rue des Champs-Élysées à Paris. Quand la police arrive, les graffiteurs s’auto-dénoncent et si elle ne vient pas, certains choisissent de se rendre jusqu’au poste de police.

Parce qu’il faut savoir que l’originalité de l’action politique des déboulonneurs ne réside ni dans la calligraphie ni dans la poésie. Ils recherchent l’intervention du pouvoir judiciaire dans l’espoir qu’il reconnaisse que leur geste est un des derniers recours pour protester contre le « neuromarketing par l’imagerie cérébrale » et autres « techniques de conditionnement manipulatoire » utilisées par la publicité. Ils demandent que la loi reconnaisse et sanctionne les préjudices que la publicité peut causer et particulièrement les annonces pour l’alcool, les voitures et la malbouffe. Ils proposent, par exemple, que les affiches qui s’imposent dans l’espace public soient restreintes à des dimensions de 50 cm par 70 cm.

On trouve des collectifs de déboulonneurs à Lyon, à Paris, à Montpellier, à Lille, à Rouen, à La Rochelle, au Mans et dans le Gard. Six autres villes françaises sont en gestation de nouveaux collectifs. Et au Québec ?

Soutien aux déboulonneurs

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