Howard Zinn

No 51 - oct. / nov. 2013

Martin Duberman

Howard Zinn

Une vie à gauche

Diane Lamoureux

Howard Zinn. Une vie à gauche, Martin Duberman, Lux éditeur, Montréal, 2013, 392 p.

Au Québec, et probablement ailleurs dans le monde francophone, Howard Zinn est surtout connu pour son Histoire populaire des États-Unis, un projet qui est intervenu assez tard dans sa vie militante et intellectuelle. Martin Duberman partageait beaucoup des engagements de Zinn, mais il nous informe, dès le début, des limites de son projet, puisqu’à la fin de sa vie Zinn aurait fait le ménage de ses papiers afin qu’on ne conserve de lui que la facette publique de sa vie et non les dimensions plus personnelles.

Cette Histoire populaire est justement le fruit des implications militantes de Zinn tout au long de sa vie adulte. Né dans un milieu juif pauvre de New York, Zinn s’engage très tôt comme bombardier dans l’aviation étatsunienne afin de combattre le nazisme. Cela lui instille un profond sentiment antimilitariste, tout en lui permettant de faire des études universitaires grâce au G.I. Bill et d’obtenir un doctorat en histoire à l’Université Columbia.

Son premier emploi, dans un college pour jeunes filles noires d’Atlanta, le place aux premières loges de la lutte contre la discrimination raciale et pour les droits civiques des Noir·e·s, même s’il en sera un acteur et non un spectateur, ce qui lui vaudra des démêlés avec son administration universitaire. Sa confrontation avec les autorités universitaires se poursuivra d’ailleurs pendant son long séjour à Boston University, affligée d’un recteur néolibéral avant la lettre.

Un autre engagement fort de Zinn est l’opposition à la guerre du Vietnam. Dès le début, il s’oppose à l’implication étatsunienne dans le conflit et participe même à une mission au Nord-Vietnam pour ramener des pilotes étatsuniens prisonniers au début 1968. Il fit également partie de la délégation d’universitaires états­uniens qui se rendit à Paris la même année pour rencontrer la délégation nord-vietnamienne qui participait aux pourparlers de paix. Cet engagement anti-impérialiste et antimilitariste s’est poursuivi contre les guerres en Irak et en Afghanistan.

Ces engagements militants allaient de pair avec ceux de type plus universitaires, que ce soit pour combattre le maccarthysme et ses restrictions à la liberté universitaire durant ses années d’études ou, à la Boston University, pour la syndicalisation des professeurs et la dénonciation du modèle élitiste d’université de même que le mépris dont faisait preuve le recteur à l’égard des employé·e·s, étudiant·e·s ou profs critiques. Même s’il n’a pas trop soigné son c.v., il a quand même laissé une œuvre importante qui dépasse largement le monde universitaire.

Cette biographie nous permet donc de revisiter, avec Zinn, certaines des luttes sociales qui ont façonné les USA contemporains et de mesurer à quel point le milieu universitaire aurait besoin de plusieurs Zinn, même s’il est peu probable qu’aujourd’hui, avec son parcours et sa perception du rôle de prof d’université, il ait obtenu un poste.

Vous avez aimé cet article?
À bâbord! vit grâce au soutien de ses lectrices et lecteurs.
Partager sur        

Articlessur le même thème